Conciliation, médiation, arbitrage: pour quoi faire ?

Le droit haïtien reconnaît le recours à la conciliation, la médiation et l’arbitrage comme méthodes de résolution de conflit. Quand et comment peut-on utiliser l’une ou l’autre de ces notions ? Quelle est leur force devant un tribunal ? Parenthèse juridique répond à ces questions et bien plus encore.

Le Nouvelliste : Comment peut-on définir la conciliation, la médiation et l’arbitrage ?
Me Patrick Laurent : La conciliation est une procédure visant à un accord des parties opposées par un litige avant l’intervention d’une décision potentiellement contraignante. Dans notre législation, pour certains litiges, les parties doivent passer par la conciliation avant d’aller au tribunal.

La médiation est un mode alternatif de résolution de conflit; elle est consensuelle. Dans la médiation, les parties trouvent elles-mêmes la solution à leur litige. Le médiateur, tiers impartial, neutre et indépendant, n’impose pas de solution aux parties. Il facilite les échanges, constate et consigne l’accord intervenu entre celles-ci. D’ailleurs, ce sont les parties qui choisissent le médiateur.

L’arbitrage est une procédure qui consiste à soumettre par voie contractuelle un litige né ou à naître entre deux ou plusieurs parties à la juridiction d’un tiers indépendant et impartial appelé arbitre. (Réf. CCAH : Guide de médiation et d’arbitrage page 14)

Le Nouvelliste : Est-ce que ces modes de résolution de conflit se trouvent dans le droit haïtien ?
Me Patrick Laurent : Bien évidemment, le droit haïtien permet de recourir aux modes alternatifs de résolution de conflit. Il y a même un chapitre du Code de procédure civile traitant de l’arbitrage, qui est modifié par le décret du 28 décembre 2005 portant réforme du livre IX du Code de procédure civile, publié dans le Moniteur du 3 avril 2006.

Le Nouvelliste : Dans quel cas la conciliation est obligatoire en Haïti ?
Me Patrick Laurent : Dans notre législation, la conciliation est obligatoire en matière de divorce ; c’est un préalable avant de soumettre la demande au tribunal. Il en est de même en matière de travail, en cas de conflit entre employeur et employé, la conciliation est obligatoire.

Le Nouvelliste : Peut-on recourir à la médiation en matière pénale dans notre législation ?
Me Patrick Laurent : En Haïti, il n’y a pas de médiation pénale. Il est de principe qu’on ne transige pas sur l’action publique. Si, dans un procès pénal, la victime trouve une entente quelconque avec le prévenu, il est important de souligner que cette entente n’engage pas le ministère public. Ce dernier continue la poursuite du prévenu ou l’accuse pour obtenir la condamnation.

À titre d’illustration : Si quelqu’un, accusé de vol par exemple, trouve une entente avec la victime, cette entente ne saurait arrêter l’action publique.

Le Nouvelliste : La sentence arbitrale a-t-elle la même force exécutoire qu’une décision rendue par les tribunaux ?
Me Patrick Laurent : L’article 963-2 du Code de procédure civile, aux termes du décret sur l’arbitrage, dispose : « La sentence arbitrale a, dès qu’elle est rendue, l’autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu’elle tranche.» De plus, elle est susceptible d’exécution forcée avec l’exéquatur du doyen (article 963-3 CPC). On peut dire que la sentence arbitrale a la même force exécutoire qu’une décision du tribunal passée en force de chose jugée.

Le Nouvelliste : Est-ce qu’en médiation le médiateur est imposé aux parties ou choisi librement par les parties ?
Me Patrick Laurent : La médiation est une procédure consensuelle. Le médiateur est choisi avec l’accord des parties. Généralement, les parties ont déjà prévu dans les contrats les modalités de désignation du médiateur en cas de conflit.

Le Nouvelliste : On parle d’arbitrage ad hoc et d’arbitrage institutionnel, pouvez-vous établir la différence ?
Me Patrick Laurent : L’arbitrage ad hoc est l’arbitrage qui se déroule en dehors de toute institution permanente d’arbitrage. Il est organisé par les parties elles-mêmes qui choisissent librement les arbitres.

L’arbitrage institutionnel est l’arbitrage par lequel les parties ont confié l’organisation à une institution permanente d’arbitrage, et qui se déroule conformément au règlement d’arbitrage élaboré par cette institution. Les parties confient le soin à l’institution d’arbitrage d’organiser tout ou partie de la procédure, et notamment de proposer des arbitres en les choisissant dans une liste de référence déterminée par l’institution.

Le Nouvelliste : Est-ce qu’il y a en Haïti une institution qui s’occupe de l’arbitrage ?
Me Patrick Laurent : Certainement oui. Il existe la Chambre de conciliation et d’arbitrage d’Haïti-CCAH.

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